Sa biographie
Née en 1955 à Versailles (78)
Lycée pilote d’Arts Appliqués de Sèvres
Diplôme de Technicien Dessinateur en Arts Appliqués et Tapisserie de Lice
Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts, Paris
Vit et travaille à Saint Front la Rivière, à Nontron (24)
Principales expositions et réalisations :
Tapisseries contemporaines (SEMA) au Musée du Luxembourg, Paris, 1983.
« World Weavers Wall », Melbourne, Australie, 1988.
« International Tapestry Network », U.S.A., 1990 à 1992.
10ème biennale internationale de miniatures textiles, Szombathely, Hongrie, 1994.
Musée des Beaux Arts de Fukuoka, Japon, 1996.
Espace Culturel François Mitterrand, Périgueux, 1997.
« Aujourd’hui la Tapisserie », Pôle Expérimental des Métiers d’Art, Nontron, 2007.
Prix : Grand prix départemental, puis régional pour la création contemporaine (SEMA), 1996.
Distinctions : Chevalier dans l’Ordre National du Mérite, 2000. Chevalier dans l’Ordre National des Arts et des Lettres, 2002.
Résidences : Jurata, Pologne, 1987. KatiKati, Nouvelle-Zélande, 2001, 2002 et 2003.
Son univers
Déterminée très jeune à mener une carrière artistique, Sylvie Weber entame sagement le difficile apprentissage de la tapisserie de basse-lice à l’Ecole de Sèvres. Elle ne sait pas encore qu’elle va trouver dans cette forme d’art tout ce qui lui est nécessaire pour exprimer sa créativité. Elle se souvient pourtant de sa fascination pour les tapis et les tapisseries dans lesquels son regard se perdait pour de longs voyages imaginaires.
Elle apprend ensuite, comme une confirmation, que son nom signifie « tisserand » en allemand et qu’elle avait effectivement des ancêtres tisserands. En gardant son nom, Sylvie Weber affirme ainsi sa vocation de licier-créateur, deux termes indissociables qui, loin d’être antithétiques, correspondent à sa nature d’artiste : un cadre, un dessin, un espace structurés, nécessaires à son équilibre, où peut s’épanouir son besoin de créer.
Ses œuvres sont le fruit d’un amour conjugué pour la recherche graphique, les couleurs et les matières qu’il faut faire se confronter, s’entendre et dialoguer. Sylvie Weber fait partie de cette nouvelle génération de liciers – il en existe une trentaine en France – qui ne sont plus des interprètes, mais bien des créateurs à part entière, assumant leurs œuvres de bout en bout. C’est dire si cette forme d’art requiert patience et lenteur, double exigence revendiquée par l’artiste comme un luxe dans un monde qui mise sur la rentabilité.
Sylvie Weber s’accorde cependant ce qu’elle appelle des « récréations ». Elle imagine des sculptures textiles pour lesquelles elle utilise des tissus anciens et du papier de soie fait de fibres de buisson mélangées. Ces œuvres sont comme autant de petits talismans qui parlent directement à notre imaginaire. Depuis quelques années, Sylvie Weber aime de plus en plus allier son travail de création actuelle et personnelle à des créations du passé, tel un fil conducteur qui unirait des savoir-faire, des cultures, des époques, des personnes n’ayant jamais vocation à se rencontrer. Elle intervient sur des tissus, des tapis anciens, à la demande de particuliers qui y attachent une valeur sentimentale et sont désireux de les faire revivre. Sylvie Weber crée ainsi une œuvre commune faite de partage, où se conjuguent le passé et le présent, l’inspiration d’aujourd’hui et la charge émotionnelle contenue dans les tissus eux-mêmes.
L’artiste a entamé une démarche similaire en créant sa première série de trois tapis peints. Déclinant la symbolique du jardin qui se rattache au tapis, Sylvie Weber a voulu redonner toute leur valeur à trois tapis anciens destinés au rebut. Sur le premier, elle a peint des sillons qui se sont révélés être en forme de boustrophédon, sur le modèle de l’écriture grecque primitive présentant des lignes ininterrompues allant de droite à gauche et de gauche à droite suivant la trajectoire des laboureurs. Le deuxième tapis, sur lequel elle a peint une crosse de fougère, symbole de la germination du jardin, a été à l’origine de sa première résidence en Nouvelle Zélande.
Quant au troisième, l’artiste avait décidé d’y peindre Adam et Eve et de l’intituler Le Paradis retrouvé avant même de le dérouler et d’y découvrir des motifs symbolisant justement l’homme et la femme. Comme elle aime à le répéter, ces expériences ont quelque chose de « magique » dans les correspondances qu’elles font naître, les surprises qu’elles réservent, les rencontres qu’elles provoquent. Elles justifient pleinement le choix sans concession de Sylvie Weber de demeurer avant tout une artiste, poursuivant, au fil de ses créations, l’idéal d’un chef-d’œuvre ultime.
A propos de l’oeuvre
Le « défi » de Sylvie Weber , selon ses propres termes, a été de créer un autoportrait en tapisserie, genre peu abordé dans cette forme d’art. Elle a choisi l’alliance puissante du bleu de Prusse et du beige et a utilisé de la laine, du raphia et du lin. Le regard, immense et omniprésent, titre de l’œuvre, témoigne de l’importance accordée par l’artiste à l’acte de regarder, un acte fort auquel participent tous les sens.
Il s’agissait de retrouver et de transmettre cette énergie et cette intensité pour parvenir à capter le regard du spectateur dans et par la tapisserie. Pour élaborer l’œuvre, trois éléments ont été choisis : un portrait de l’artiste en noir et blanc, un dessin de Philippe Demeillier, un portrait de Mathilde, l’arrière- grand-mère de l’artiste, en robe de satin.
Les trois éléments ont fusionné et se sont mêlés pour aboutir à ce visage dont le regard et le profil sont volontairement très réalistes et très présents. Le contraste entre les deux yeux, l’un clair, l’autre dans l’ombre, exprime la dualité, l’ambivalence.
Un troisième œil, apparu fortuitement – trace involontaire de la pierre du turban de Mathilde – évoque une autre manière de sentir et de voir, plus spirituelle.