CROSBIE Tony – « Piéta »

La biographie de l’artiste

Tony CROSBIE

Né en 1956 à Dublin (Irlande).
Vit et travaille à Monpazier (24).

Principales expositions personnelles depuis 1999 :
2009 Hommage, Atelier des Bastides, Monpazier (24).
2008 Journée du Patrimoine, Château de Clerans, Cause-de-Clerans (24) ; Maison Des Artistes, Atelier Contempora, Ribérac (24) ; La Vérité, Galerie 21, Bordeaux (33) ; Amnesty International, 60e anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, Théâtre des Champs Elysées, Paris (75).
2006 Wasteland, Broadstone Studios & Gallery, Dublin, Irlande.
2003 Viva Cuba!, Galerie Nationale, Iles Caïmans.
2002 Obsession, Draiocht Arts Centre, Dublin, Irlande.
2000 Romeo’s Bleeding II, Art Concept Gallery, Berlin, Allemagne.
1999 Crimes Against Humanity, City Arts Centre, Dublin, Irlande. Listowel Arts Centre, Listowel, Irlande. Drogheda Arts Centre, Drogheda, Irlande.

L’univers de l’artiste

Pour Tony Crosbie, artiste irlandais, autodidacte et instinctif, « l’art vient du ventre, pas de l’esprit ». À travers ses peintures, sculptures, photographies et installations, il signe, dans une urgence très expressive, un constat fort et terrible de la solitude de l’humain face à la banalisation de la violence dans notre société. Son oeuvre, puissante, émotionnelle et provocante, se nourrit de ses propres expériences – il a notamment enseigné l’art dans les prisons.

Il se dégage de ses compositions une énergie qui tient à la fois aux sujets abordés et aux techniques employées. Son univers peuplé d’êtres écorchés est, à l’image du monde qu’il décrit, complexe et absurde. Sans être moralisateur, le propos dramatique est toujours contrebalancé par un sens plastique vigoureux. Tony Crosbie aime avant tout la matière, il entretient un rapport quasi charnel avec la peinture, la terre ou encore le métal.

La série Crimes Against Humanity (1999) présente des dessins au fusain de grande taille où des silhouettesà peine esquissées se tiennent couchées, à genoux ou dressées comme des affirmations.

Dans la série Wasteland (2006), dont le titre peut être traduit par « terrain vague » ou « terre à l’abandon », les contours se font plus précis. Les personnages dessinés à la mine de plomb reviennent comme un motif obsédant de corps sans bras, nu, émacié, avec une tête démesurément allongée sur de faibles épaules.

Les peintures de la même année sont à échelle humaine, de couleurs franches où dominent le noir, blanc, rouge et bleu. De face, seules ou en groupe, ces silhouettes aux yeux bandés ou bâillonnées deviennent les cibles de toutes les attaques physiques ou morales qu’il est possible de faire subir à l’individu et aux peuples. Pour Tony Crosbie, « il est important de créer des oeuvres qui soient à la fois didactiques, sans concession et belles.»

Dans une série récente de photographies, il utilise certains attributs du Christ, la croix, la couronne d’épines, pour nous parler de l’homme et de sa condition, en lien direct avec notre mémoire culturelle. On peut voir également un homme nu, attaché au cou par une laisse, pour traduire l’idée de soumission, d’humiliation, de dépendance qui peut exister dans notre société. Son style expressionniste se retrouve aussi dans ses sculptures composées d’objets récupérés, bouts de bois, cordes, tissus. Au sujet du groupe sculpté La Famille, il s’exprime ainsi : « J’ai représenté la famille telle que les gouvernements veulent qu’elle soit : enchaînée par des besoins matérialistes créés de toute pièce par tout le matraquage publicitaire de la télé, d’où le choix de cette couleur or qui évoque le clinquant, l’inutile et ces chaînes qui symbolisent cet esclavagisme moderne ».

Le travail de Tony Crosbie produit une réflexion sur le rôle de l’art et de l’artiste aujourd’hui, qui doit selon lui traiter de la violence des conflits aussi bien politiques que privés et interroger l’objectivité de notre regard altéré par le flux d’images qui envahit notre quotidien. Plus qu’une dénonciation, il s’agit de mettreà jour les errances et les disfonctionnements de notre société afin de réveiller les consciences endormies.

A propos de l’oeuvre

Piéta – 2009
photographie sur papier, 90 x 60 cm
Oeuvre acquise par le Conseil départemental de la Dordogne en 2009

Pour ses photographies, Tony Crosbie recherche un décor bien particulier, principalement des bâtiments en ruine ou des lieux abandonnés voire squattés, qui mettent en évidence la beauté résidant dans le passage de la vie à la mort.

Il utilise la lumière naturelle qui filtre des fenêtres délabrées, s’accrocheà la peinture écaillée des murs, ricoche sur les tessons de bouteilles jonchant le sol. Le titre, Piéta, fait référence au thème de l’iconographie chrétienne représentant Marie, la mère du Christ, tenant sur ses genoux le corps de son fils mort.

Depuis la version de Michel Ange, de nombreux peintres et sculpteurs ont utilisé cette image emblématique dans des oeuvres laïques pour symboliser la douleur des hommes.

Cependant, les rôles sont ici inversés, un homme assis tient le corps d’une femme allongée, tous les deux nus, baignés d’une lumière douce. Sur ce couple planent des thèmes et interrogations intemporels.

Cette approche chargée de modernité, de tolérance et d’émotion parle de vies brisées, de combats quotidiens, de libertés foulées aux pieds. Une protestation muette, un cri silencieux.